En 68, l'inattendu, qui a complètement stupéfié la politique  française.  A tel point que De Gaulle a foutu le camp comme un péteux. Il  a fallu  que le Général (?) aille le chercher. Sa famille était partie  en  hélicoptère. 
La jeunesse a eu une explosion de révolution, de libéralisme, de   velléité diverse, elle a lâché les brides qui la maintenait aussi bien   dans l'instruction, dans le phénomène parental, les jeunes dans le   travail également, surtout dans les universités. Ils se sont libérés de   ce joug.
Pour qui, pourquoi ? ils ne savent pas trop. Cela a été une impulsion   instinctive, un phénomène de groupe. Comme ce phénomène des groupes de   dauphins qui vont s'échouer sur les plages sans qu'on sache pourquoi,   projetés par un instinct. 
Eh bien là toute la jeunesse française a été projetée dans la rue. 
Ça n'a pas été jojo. Il y a eu des dégâts. Eh bien parce qu'il fallait   qu'une expérience se fasse à partir de la future génération de la   jeunesse des cadres de la société qui sont véritablement pourris ! On   vous menait, les jeunes, à l'abattoir. Jamais autant aujourd'hui il n'y   aura eu autant de déclaration de guerres. Il y aura une défection des   jeunes car ils ne veulent pas la guerre. Ils se rendent compte qu'ils ne   vivent pas pour aller tuer des gens qu'ils ne connaissent pas d'abord.
Mais parmi ceux qui sont exploités dans cet apparent laxisme, il y en a   qui ont réfléchis, il y en a qui ont critiqués les Gouvernements du   moment et puis de nouvelles politiques se sont plus ou moins installées.   
N'empêche que à côté de cela, la prise de conscience n'a pas été très   précise, ni très bonne parce que l'élite de cette jeunesse, c'est-à-dire   les jeunes universitaires… Avez-vous visité des Universités à l'époque   et même aujourd'hui ? Elles sont sabotées par ces élites ! Ils ont   saboté leurs classes, saboté leur matériel. Vous pouvez aller encore   dans certaines Universités, même à Nantes, des inscriptions imbéciles,   partout. Pour des gens qui étaient "l'élite" de la génération à venir eh   bien c'était de la pourriture, c'était du sordide. Vraiment c'était   décevant de voir cela, car c'étaient ceux qui devraient encadrer la   jeunesse de la rue. Ils devaient montrer l'exemple face aux anciens, aux   "croulants" si vous voulez. Eh bien ils ont été pires que les jeunes   travailleurs. 
Alors ce fut le plaisir de démolir, de ne plus avoir de brides, il y a eu des heurts avec la police bien entendu.
Ça n'a pas servi à grand-chose parce qu'à partir de là, les politiques   qui en sont sorties, ont été un laxisme dans tous les domaines : dans   l'art en particulier, dans la langue, la poésie… nullité, torchons… et   ça se prend pour des petits génies. Il y en a eu, il y en a encore. A   partir de là justement, "l'art", c'était l'art populaire. Bon, et puis   on fait n'importe quoi sous prétexte que c'est de la création.
Ces jeunes ne sont plus guidés car ils ne veulent pas être guidés. Ils   ne veulent plus de maitres. Dans les classes, vous avez de jeunes   éducateurs, des institutrices qui se sont suicidés. C'est infernal.   C'est pas croyable. Des insultes ! N'importe quoi ! Comment voulez-vous   enseigner des monstres ?Ils ne veulent plus être encadrés ! Alors   qu'est-ce qu'ils vont foutre à l'Université ? Pour avoir des bourses,   des trucs comme ça ? Bon, il y en a qui travaillent quand même. Bon,   c'est reparti en principe, et puis maintenant il y a les carrières, il y   a l'ambition quand même, et les familles poussent derrière. 
Donc le Verseau a suscité dans la jeunesse la liberté totale, mais cette   liberté devait provoquer un choix et de bons choix, ce qui n'a pas été   fait, et il fallait justement les jeunes cadres intellectuels pour  faire  ces choix-là et ils n'ont pas été faits. Il n'y avait rien, aucun  choix  moraliste, par exemple. 
Vous savez que Cohn Bendit, en Allemagne, il a un camp de jeunesse où il   apprend aux petites filles et aux petits garçons à baiser ! Il l'a dit  à  la télévision, comme ça !! Et ça se permet de donner des leçons de   politique ! Je parle de lui parce que c'est un révolutionnaire, il était   dans la rue le type, et puis il n'y en avait que pour lui à la radio.
Alors maintenant évidemment, une jeunesse se cherche, essaie de se   reconstituer, et cette jeunesse évidemment, elle sent très bien qu'il   n'y a pas que le plaisir. Au-dessus du plaisir il y a l'amour, il y a   l'affection, une sorte de fraternité, de respect l'un de l'autre.
Donc il y a à présent deux sortes d'individus face au couple libre :   "ceux qui veulent bâtir, ceux qui cherchent le plaisir. C'est donc un   tournant auquel nous assistons entre deux ères. 
Il y avait 67 000 concubins en 68, ils étaient 600 000 en 1986. Les   cohabitants ne sont plus des marginaux. Le phénomène s'étend à tous les   milieux. 45% de non mariés chez les jeunes ménages. 
Certains couples en union libre évoquent comme raison essentielle,   l'hypocrisie d'une signature qui se fait par manque de courage, manque   de volonté de prise de risque de se séparer quand il n'y a plus rien   entre les deux conjoints. 
Ça c'est parler pour ne rien dire, car de toute façon ils ne savent pas   pourquoi ils se marient. Si on ne s'aime plus, c'est l'aveu de jouir   simplement de l'instinct de s'aimer. Ils ne bâtissent pas l'amour. Or   l'amour ça n'existe pas si ce n'est pas bâti. Il y a d'abord un instinct   naturel, des affinités…. On se plait. Et puis il y a les attributs   sexuels complémentaires. Ça c'est la nature. Et quand ça ça a fait son   petit usage, que reste-t-il ? Si grâce à ça et avec ça on ne bâtit pas   par-dessus : l'amour. Il ne reste rien s'il n'y a rien de bâti. Bien sûr   !
Il est évident que si on n'apprend pas à l'homme sa raison de vivre….   Bah oui, il n'y a qu'à faire une autre expérience, et puis une autre, et   puis encore une autre ! 
Quand on arrive à 50 ans après avoir vécu comme ça on comprend qu'il va   falloir bâtir sur autre chose que ces attraits et plaisirs.   Malheureusement on a perdu 30 ans ! A quoi faire ? Chercher une espèce   d'ame-sœur par les attraits et les plaisirs. Ça ne compte pas. 
La vie c'est quelque chose qui se conquière, qui se respecte, qui se   bâtit à deux, avec la notion de regarder dans la même direction. Et   savoir pourquoi ! A ce moment-là on veut rester ensemble parce qu'on   s'est plu au départ. Et à ce moment-là on solidifie les éléments de   départ qui ont été acceptés.
Ce qui est c'est l'aspect sincérité. Autrefois on n'avait que des mariages de raison. Pas de sentiment. 
Autre argument des concubins : on ne veut plus de train-train, de la routine, répétition…
Autrement dit : on se marie pour jouer [ou "jouir" ?], pour le plaisir, et quand on est fatigué, on change.
Est-ce que vous croyez que dans le métier, dans le travail, quand on   veut gagner sa vie, c'est comme ça ? Un beau jour : "Bah, ça me dit plus   rien le boulot, je fous le camp". Oui, mais il faut en trouver un   autre, et là, c'est pas pareil.
On est soumis quand même à des lois naturelles, et de gré ou de force,   si on veut progresser dans le domaine salarial, il faut essayer de bien   travailler, de bien faire, et même dans un travail qui ne nous plait   pas, essayer de bien le faire, parce que c'est en même temps une   acquisition de volonté et d'énergie. C'est pas quand quelque chose vous   plait, que l'on crée une énergie. Il faut donc prendre sur soi pour   avoir une régularité et ensuite obtenir une liberté, parce que le   travail qui déplait à ce moment-là ne déplait plus, on n'y pense même   pas, mais on travaille pour ensuite avoir cette liberté totale de   l'être, qui doit à ce moment là faire tout ce qu'il veut avec les   moyens qu'il a acquis par son travail.
Dans le couple c'est pareil. Il n'y a pas de couple sans travail, il n'y   a pas de couple sans fraternité au départ. La fraternité c'est quoi ?   C'est pas simplement baiser une ou deux fois par jour et tous les  jours,  sortir ensemble, faire les bonnes parties. C'est travailler,   c'est-à-dire : un couple travaille, dans le sens noble du terme, en   voulant mieux connaitre son partenaire. C'est le commencement de   l'apprentissage de la psychologie réelle : vivre à deux. On a l'habitude   de dire : "il faut vivre avec les gens pour les connaitre". Et ça  c'est  bien vrai, parce que le naturel apparait, et bon, les défauts et  les  qualités apparaissent [?].
Les défauts, ce sont plutôt des manques, et on ne veut pas combler ses   manques, et ça, ça manque à l'autre, justement, parce que l'autre attend   une qualité que le partenaire ne veut pas bâtir ; et puis ça commence   comme ça. Donc il y a un travail, et ce travail s'il n'est pas  fraternel  d'abord, il n'y a pas d'amour ensuite. La fraternité du  couple est la  même que la fraternité entre les hommes en général,  l'humanité, entre  les nations, etc.
Il faut d'abord comprendre qu'il faut bâtir à deux. SE bâtir à deux,   s'entr'aider l'un l'autre à se bâtir et à bâtir l'autre. Et ça il faut   l'accepter au départ. Nous sommes à deux et nous devons devenir plus   riches de nous-mêmes, plus beaux de nous-mêmes, de façon à nous bâtir à   deux, nous élever à deux, c'est-à-dire s'épanouir à deux.
Le mot "épanouir" est composé de PAN, qui veut dire "tout". Donc on peut   dire que le couple trouve de tout comme prétexte à s'épanouir,   c'est-à-dire à essayer de comprendre, de bâtir, de se plaire et   s'apprendre l'un à l'autre ce qui ne va pas.
"Je te comprends pas. Je vois pas ça comme ça…"
"Pourquoi ?"
"Alors essayons de comprendre".
Et chacun donne son opinion, non pas pour avoir raison, pour donner sa façon de penser, ce qui peut être modifiable.
Si chacun veut rester borné sur une opinion, c'est le commencement de la dégradation du couple. C'est là le drame.