DRUIDESSES, femmes gauloises ou celtes qui exerçaient la triple fonction de prêtresses, de magiciennes et de prophétesses. Il ne paraît pas qu'elles fussent assujetties à une loi et à des règlements identiques, car les historiens nous ont laissé à leur sujet les récits les plus contradictoires ; ici, la druidesse ne pouvait dévoiler l'avenir qu'à l'homme qui l'avait profanée ; là, elle se vouait à une virginité perpétuelle ; ailleurs, quoique mariée, elle était astreinte à de longs célibats, et ne pouvait voir son mari qu'une fois l'année. Elles avaient le droit d'offrir des sacrifices et d'immoler des victimes, surtout en temps de guerre et en l'absence de leurs maris, car il arrivait souvent que les femmes des druides partageaient avec leurs époux les fonctions du sacerdoce. Il y avait même des sanctuaires où les femmes seules pouvaient offrir des sacrifices et répondre, de la part de la divinité, à ceux qui venaient consulter l'oracle : tel était le sanctuaire des Namnètes, situé à l'embouchure de la Loire, dans un des îlots de ce fleuve. Quoiqu'elles fussent mariées, nul homme n'osait approcher de leur demeure ; c'étaient elles qui, à des époques déterminées, venaient visiter leurs maris sur le continent. A Séna (île de Sein) était l'oracle célèbre des neuf vierges terribles, appelées Sènes, du nom de leur île. Pour avoir le droit de les consulter, il fallait être marin et avoir fait ce pèlerinage dans ce seul but. Ces vierges connaissaient l'avenir ; elles guérissaient les maux incurables ; elles prédisaient et provoquaient les tempêtes. Quelquefois ces femmes devaient assister à des sacrifices nocturnes, toutes nues, le corps teint de noir, les cheveux en désordre, s'agitant dans des transports frénétiques.
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Les druidesses étaient encore plus respectées chez les Germains que chez les Gaulois. Les premiers n'entreprenaient rien d'important sans avoir consulté ces prophétesses, qu'ils regardaient comme inspirées ; et quand ils auraient été certains de la victoire, ils n'auraient osé livrer bataille, si les druidesses s'y étaient opposées. On a recherché quelle pouvait être l'origine de cette grande vénération qu'inspiraient ces sortes de femmes. On peut conjecturer que les Germains, presque toujours retenus loin de chez eux par des expéditions militaires, confiaient à leurs femmes le soin des malades et des blessés ; que ces femmes, dans le cours de leurs occupations paisibles, eurent occasion d'étudier les vertus des herbes et des plantes, dont elles se servirent ensuite pour opérer des choses qui tenaient du prodige ; qu'elles joignirent à ces connaissances des observations superstitieuses sur les astres, le vol des oiseaux, le cours des rivières, par le moyen desquelles plusieurs des plus habiles parvinrent à se faire passer pour inspirées, et firent quelques prédictions confirmées par le hasard.
Le pouvoir des druidesses sur l'esprit des Gaulois dura, malgré les édits des empereurs et les préceptes du christianisme, bien plus longtemps que celui des druides. On les voit encore au temps des rois de la seconde race, sous les noms redoutés de fanœ, fatuœ gallicœ, exerçant un grand empire sur l'esprit des Gaulois et même sur celui des Francs. Le peuple les croyait initiées à tous les secrets de la nature ; il les supposait immortelles. On leur attribuait le pouvoir de métamorphoser les hommes en animaux de toute espèce, surtout en loups. Le bonheur des familles dépendait, disait-on, de leur amitié ou de leur haine. Pour donner plus de force à ces croyances superstitieuses, elles établissaient leur demeure dans des lieux cachés ; elles habitaient au fond des puits desséchés, dans le creux des cavernes, aux bords des torrents. Ce sont elles qui figurent sous le nom de fées dans toutes nos traditions populaires ; ce sont les héroïnes de ces contes merveilleux dont on amuse encore les enfants ; peut-être même plusieurs des sorcières qui furent brûlées dans le moyen âge étaient les derniers restes des druidesses.