Pascal voulait faire de la physique avec l'expérience plus que la rationalité. Il considère que chaque problème doit être résolu par des expériences singulières, créées à chaque fois.
Il y a autant de méthodes que de problèmes à résoudre.
Ainsi la méthode consistant à "voir" le système à l'avance, y compris dans ses principes, pour y réduire le réel, est infondée et source d'erreur.
Méthode de découverte à partir d'a priori qu'on a inventés de toutes pièces. Ce qui oblige à tordre le réel, pour qu'il colle à la grille.
Il y a plutôt une grille à découvrir par problème.
Il n'y a pas qu'une logique.
De même en politique, ce que l'on croit rationnel et valoir universellement, n'est que le fait de coutumes devenues "raisons", alors qu'elles sont toutes particulières.
Faute de Descartes : A voulu commencer par des principes intelligibles en soi, auxquels se rattachent tout de suite ses déductions. C'est une faute identique à celle des atomistes qui croient pouvoir connaitre d'abord les parties élémentaires dont le tout est composé et reconstituer le tout, en juxtaposant les parties. Car "les parties du monde ont toutes un tel rapport et un tel enchainement l'une avec l'autre, que je crois impossible de connaitre l'une sans l'autre et sans le tout".
Pascal se range d'abord du côté des pyrrhoniens et de Montaigne : "Qu'est-ce que nos principes naturels, sinon nos principes accoutumés ?" Une différente coutume en donnera d'autres... La coutume est une seconde nature qui détruira la première. Mais qu'est-ce que la nature ? Pourquoi la coutume n'est-elle pas naturelle ? J'ai bien peur que cette nature ne soit elle-même une première coutume".
Mais Pascal veut ensuite sortir du pyrrhonisme grâce à une source de connaissance qu'il appelle le coeur et parfois l'intelligence. Coeur ou intelligence s'opposent à la raison (raisonnement, discours, connaissance des conséquences à partir des principes).
La raison est "ployable à tous sens" car elle conclut comme le veulent les prémices qu'elle a reçues d'ailleurs ; le coeur donne des connaissances qui sont de l'ordre des principes ; C'est le "Dieu sensible du coeur" ou "les axiomes de la géométrie". "Le coeur sent qu'il y a trois dimensions dans l'espace, et que les nombres sont infinis".
De même il contredit Montaigne, qui a vu faux parce qu'il a ignoré la grandeur de l'homme ; il aboutit ainsi, par complaisance en son moi et toutes les sottises qu'elle lui fait dire, à pis qu'au désespoir, à une nonchalance du salut, sans crainte et sans repentir"... "Il ne pense qu'à mourir lâchement et mollement".
L'homme étant perdu entre l'infiniment grand et l'infiniment petit, la raison, les théories définitives sur lui-même, sont vaines.
Il lui reste la ressource de la Révélation.
La ressource du Moi comme centre de toutes choses est une illusion.
La preuve son penchant à se divertir. Quand l'homme est seul avec son moi, il s'ennuie ou cherche à se divertir, en allant vers les choses. Il est en fait sans cesse en état de fuite en avant entre elles et lui. C'est là son drame.
Les traits de la nature humaine s'appliquent à la destinée surnaturelle de l'homme révélée par le christianisme : L'illusion du philosophe était de croire en une nature à laquelle il veut en vain tout rapporter. Il faut changer de perspective et voir l'homme dans le drame surnaturel dont il est acteur.
Sa grandeur dont lui vient son origine divine, sa misère née avec la chute d'Adam dont les enfants ne peuvent plus résister à la concupiscence, enfin l'espoir du salut par la rédemption de Jésus-Christ, sans qui la connaissance de Dieu serait inutile à l'homme.
C'est un drame à trois actes : Création, Chute, Rédemption, servant même à la trame de l'Univers (rythme monotone : Station, Procession, Conversion).
Pascal veut montrer l'exact ajustement du christianisme à la nature humaine. C'est ce qui peut attirer le libertin à la religion.
Bréhier