Décembre 1968
La Genèse ! Voilà une création bien lointaine et mystérieuse pense-t-on,  alors qu’en fait, elle est présente, continuelle, en cours. Les  événements actuels ne suffisent-ils pas à démontrer cette laborieuse  gestation ? Certes, l’origine humaine fut divinement conçue, puis notre  race incarnée, mais non point terminée. Un enfant n’est pas un homme, et  notre humanité actuelle n’est pas encore devenue virile au sens de  l’Homme complet ou accompli.
Si le temps des hommes a aussi ses âges, cette fin de temps, d’un Temps,  aboutit à une adolescence retardée et turbulente de la planète humaine,  elle vit à peine son moyen-âge, mais pour le moins elle ressent de  toute part comme jamais, une sève printanière vigoureuse qui la rend  folle de sentiments contradictoires. Nouvelle ère, nouveau sang,  mutation. L’humanité subit une certaine saison génésiaque. Son heure de  croissance génétique est en conflit avec une même intense parturition de  sentiments, de l’intellect, de l’esprit, de besoins.
Cette tension génétique générale est génératrice de génies monstrueux ou  illuminés d’une conscience novatrice. Mais dans l’effervescence de  cette double génération qui se heurte dans la violence des  courts-circuits du Verseau qui fait sauter tous les fusibles, la  confusion apparente prépare la fusion qui unit vers l’harmonie. Nous n’y  sommes point encore, des décennies seront nécessaires pour décanter ces  mélanges en un amalgame social conscient et viable. La Terre elle-même  sursaute, tout s’affaire et le ciel donne ses signes pour que l’esprit  et le corps terriens deviennent cosmiques.
La Terre humaine ne fait que balbutier la vie, mais elle la recherche  dans son propre chaos avec une ardeur imbécile et cruelle sans doute,  mais le Jésus ne vomissait-il pas les tièdes ? Le chemin de cette sorte  de violence n’était pas nécessaire pour que la Vérité se parlât sur elle. Maintenant elle cherche ses mots dans les inter-actions  des idées, sentant obscurément l’importance primordiale de l’énoncé des  choses et de la vie.
Rien ne se crée de rien, sans action ni réaction. Tout découle d’un état  antérieur en mouvement. Le mot même CREATION contient intégralement le  mot REACTION et aussi ACTION’ER. Toute création est sans fin, elle est  RE-ACTION, nouvelle action, par autocréation d’un stade de son  évolution. Créer, c’est actionner sans cesse l’objet conçu. Rien n’est  inerte, la vie n’est que du mouvement et la conscience liée à  l’intelligence dirige dans un sens ou un autre ce mouvement, dans la  matière ou dans l’esprit.
Toute création est évolutive. Le mot évolution n’a pas de sens  directionnel, c’est à l’homme de lui donner un critère, un sens, il est  inspiré pour le choisir à son gré. Mais dès lors où un Dieu a choisi un  sens à la vie, les créatures dont il a charge, “évolueront” quels que  soient leurs choix, plus ou moins vite, vers le sens défini par cette  supra-conscience. Ainsi, le phénomène christique décrit ce renversement  du choix des hommes par le Sien-propre. Et dans le Temps des évolutions,  c’est l’ère du Verseau depuis 1950 qui est celui de la con-fusion  obligatoire des choix. Cela ne va pas sans aléas dans la ré-action des  hommes qui doivent néanmoins conserver leur notion de libre arbitre,  mais à la mesure de leur résistance inadéquate à l’influx divin, ils  ressentent douloureusement et de diverses manières le fait de se  maintenir à contre courant. Il est évident que le nageur fatigue en  s’efforçant vers l’amont et qu’il réduit sa vitesse par rapport à celui  qui nage dans le sens du courant.
“Matière, Esprit, Science”, apparaissent donc de plus en plus comme  trois mots clefs aux questions des hommes torturés de ces trois besoins.  Pendant un temps encore on voudra exclure l’un d’eux pour se repaître  d’un autre, mais l’absence d’un ou deux blessera de plus en plus  profondément et visiblement toute tendance particulariste qui ne voudra  pas fusionner cette tri-unité, “tri-indivinité”, essentielle à la vie, à  la vie des hommes, à toute action et à toute création.
Ces trois particules génétiques se partagent laborieusement dans la  matrice du Temps les aléas d’une éclosion exceptionnelle homo-divine. Il  faut de la Science pour concevoir, il faut une science et de l’Amour  pour remédier à toute création dont le but est d’embellir et d’être  utile. Il n’y a rien sans Intelligence et attribuer à ce Grand-Oeuvre qu’est notre création, un Dieu immuable, aux dogmes cimentés à  jamais, serait lui vouer une adoration crétine qui ne ferait pas honneur  à la conception première de l’Oeuvre, ni à son Géniteur.
La destinée de cette conception n’est qu’une destination, la route et  les étapes en sont les créations successives ou : générations qui se  regénèrent les unes les autres, par croisements de sangs, de pensées, de  croyances. Et il serait naïf de la part des croyants de ne pas  concevoir que la Terre ne ferait pas l’objet d’une formidable Science  d’influence de la part de ses serviteurs extra-terrestres de toutes  essences, ni de son Maître ! L’Esprit ne peut se manifester que par une  Science et tous deux ne peuvent être signifiés que par et dans la  Matière. L’homme athée qui a encore la niaiserie de croire à “sa”  science devrait se prosterner devant la Nature et l’adorer plus qu’un  Jésus-Christ au nom de l’Intelligence qu’Elle mit à concilier des  hasards ; Elle, matière sans voix, qui de sa poussière et de ses salades  fit un bipède pensant ! Tranquille inconscience des esprits forts ! qui  “comme la cécité de l’aveugle, dit Aimé Michel dans Planète 41, assure  la paix de son âme, tandis qu’il gambade au bord d’un abîme qu’il ne  voit pas. Il faut désormais nous habituer à l’idée de ce vaste abîme  peuplé d’êtres (mais peut-on encore parler d’êtres ?) qui nous dominent  d’aussi haut que nous dominons la limace et la bactérie.”
- Nous ne sommes pas issus de rien ou du pur hasard, c’est le manque de  considération d’une finalité intelligente attribuée à notre présence  terrestre qui fait que les actions humaines sont incohérentes,  étrangères à cette finalité et par conséquent destructrices. Pour le  moins quand cette considération est mystique, elle est déplacée sur un  plan d’inefficacité par les religions et ruinée par la division et  l’infantilisme de ses théologies.
La vie est issue de la Vie, notre pensée d’une Pensée cosmique, notre  matière d’une Energie condensée etc... A la portée de nos concepts  humains, tout est métamorphose dans le creuset temporel où s’allient  Matière Esprit et Science. Cette loi plurielle est la seule qui autorise  les mutations en toutes les dimensions possibles, même d’un futur  converti en passé ? Pourquoi ? Parce que pour qu’une chose ou un être  soit la manifestation de la vie, c’est-à-dire naisse d’une autre chose  ou d’un autre être, il faut que cette chose ou cet être soit à la fois  matrice et fruit, cause et conséquence, mère et fils, arbre et graine,  semeur et semence, début et fin, etc... Il n’est pas de chose qui ne  soit issue d’une autre, et la pensée-même ! Il n’est pas une chose ou un être qui ne soit imprégné d’autres choses ou d’autres êtres.
Mais où est la Chose Première ? Puisque tout est uni-vers-elle ! Nous en  revenons toujours à l’énigme du postulat philosophique de la primauté  du premier oeuf ou de la première poule... “Les premiers sont les  derniers” dit une parabole très scientifique des Evangiles. Les derniers  peuvent donc devenir premiers, un futur devenir ou être notre passé,  pourquoi pas ? Des physiciens ont réalisé au niveau du noyau ou de la  particule élémentaire le renversement du temps. Jacques Bergier dit :  “Une véritable théorie synthétique de l’univers, embrassant à la fois la  physique, la biologie, la psychologie et la parapsychologie, sera  nécessairement faite par les savants. Mais ils devront d’abord se  libérer du blocage psychologique qui les empêche d’admettre comme  possibilités scientifiques l’action futur sur le passé, les  interventions extérieures d’autres intelligences que la nôtre (des  scientifiques comme Michaël Watson envisagent des contacts psi avec des  intelligences sur d’autres planètes), la synchronicité, etc. Une  libération de l’esprit scientifique se produira lorsque les savants  s’apercevront que la science elle-même est fantastique, et aussi  lorsqu’ils apprendront à penser librement et à écrire librement sans  crainte du ridicule”.
On ne peut s’en tirer que par une pirouette. C’est-à-dire un renversement, une rotation complète. Si la chose première est à la fois la dernière,  Oméga ET Alpha, Fin et Commencement de toute chose, “C’est que le  Commencement naît de la Fin ! Solution absurde ! Bah, c’est pourtant  ainsi qu’on utilise l’X algébrique en donnant à l’Inconnue : la valeur  du fait accompli, c’est-à-dire qu’on l’imagine valeur connue, finie,  définitive. Et c’est bien parce qu’on utilise cette “fin” au  commencement du problème que celui-ci va vers sa solution, sa  résolution. Le commencement ne peut naître que de la fin, sinon le  problème reste une énigme. Le parcours de la circonférence n’a point de  commencement, ou s’il en est un de désigné, ce point est à la fois son  but et dé-but ! la fin donc ne peut pas devenir si elle ne s’ensemence  pas elle-même à l’origine.
Absurde ! Oui, vous avez raison parce que vous ne concevez pas que le  non-temps puisse exister et que notre espace-temps serait aussi  malléable qu’un ruban entre vos mains. Absurde, parce que vous ne  réalisez pas qu’il y a plusieurs dimensions du Temps, de défilements, de  sens, d’états, de matières, d’êtres. Que nous ne sommes pas, dans notre univers, les seuls possesseurs de lois  physiques particulières et qu’il en existe quantité d’autres sortes Ailleurs. Parce que nous vivons dans un monde dont la structure est plus  abstraite qu’il n’y paraît ; il suffit de s’en rapporter aux dix  catégories d’Aristote qui classent et concernent toutes les idées,  phénomènes et choses possibles de l’homme et de la création. C’est ainsi  que nous sommes obligés de constater qu’il y a neuf catégories de  caractère abstrait dans lesquelles s’impliquent toutes choses pour une  seule qui est concrète. Alors, l’homme, ses choses et sa matière  évoluent dans un abstrait écrasant pour les prétentions de nos  matérialistes à vue étroite !
L’homme comprendra-t-il enfin qu’il est situé, pour naître, dans un  monde mystérieux, le plus mystérieux sans doute de tous les univers  parallèles et qu’il restera pour lui-même une énigme s’il ne mute pas sa  logique à deux dimensions pour celles, fantastiques, qui régissent la  conception des Mondes et leurs interférences.
Il faudra, de gré ou de force, penser à l’avenir que notre monde, notre  Temps, se “croise” avec lui-même, dans un accouplement polarisé de ses  “sens” de direction et d’état d’être, car tout est croisement pour  fécondité. On finira bien par comprendre Jésus quand il dit : “Je suis  le Commencement ET la Fin de toutes choses.” On finira bien par admettre  la loi de Sourbieu : “La Fin naît du Commencement, comme le  Commencement naît de la Fin.”
A nos intellects, une chose ne se révèle, ne se comprend, que “croisée”  avec une autre. Pour comprendre nos énigmes, nous devons vouloir  “crucifier” nos idées chères avec ou pour celles qui nous sont absurdes ;  c’est un sacrifice de quitter ses croyances ou pensées favorites pour  des étranges étrangères. Et pourtant c’est en crucifiant, en croisant  tous les concepts possibles qu’apparaîtra une structure tramée régulière  sur laquelle enfin une perspective nouvelle des choses pourra se broder  dans une logique nouvelle. Non plus une logique linéaire étroite à sens  unique, mais de profondeur, spatiale et rayonnante comme la lumière.
Il n’y a pas de Science, de Connaissance, de fertilité, d’intelligence  sans “croisement”. Or, toutes les archives actuelles de nos  connaissances hétéroclites, disparates, sans cohésion ni cohérence sont  justement des “arches d’alliance” incomprises. Malheur à l’organisme qui  rejette un seul iota, une seule pièce de ce puzzle universel ! Tout ce  qui est donné à l’homme a pour objectif d’être re-lié par lui et là est  sa seule raison humaine. Religion ? Religare !
Un seul élément rejeté devient la pierre d’angle sans laquelle l’édifice reste fragile, incohérent.
La seule opération admise par l’esprit tel qu’il nous est imparti pour  nous enrichir est l’addition. Sa croissance est forcément liée à la  multiplication. Cette opération n’a jamais voulu être spécialement  démographique. Le “Croissez et Multipliez” s’adressait tout autant à nos  moyens enrichissants qu’aux qualités de l’être et de l’esprit.
Quant au reste il n’est pas besoin d’ordre de croissance mais bien au  contraire d’y mettre de l’ordre ! Et si un homme et une femme se  croisent pour se re-produire et faire un enfant, toutes choses  s’additionnent et se croisent pour se multiplier en valeurs et  connaissances, pour se re-produire sans fin en découvertes multi-pliées.
Mais si la multiplication est une opération sine qua non de progrès,  elle peut être aussi une croissance d’erreurs et de malheurs si elle  n’est pas judicieusement “croisée” en tous sens. Le mot sens ayant  double sens de direction et de polarité. C’est alors que les finalités  se discriminent. Car progresser n’est pas entasser. Or notre  civilisation naissante et prétentieuse de modernisme, de sciences et de  forces, n’est pas autre chose qu’un entassement hétéroclite  d’antagonismes incohérents, voire un chaos.
Certes, c’est alors qu’un esprit de synthèse se révèle indispensable par son absence même.
Et c’est le croisement des choses qui commence laborieusement à se  confusionner avec ses heurts inévitables, tant que les raccords ne  coïncident pas.Mais cette effervescence des incidences et co-incidences qui se  cherchent est passionnante. De partout ne dit-on pas qu’un vent souffle sur le monde ?
Et qui donc souffle au monde la direction de sa nouvelle conscience ?  Qui souffle contre les faux élans des hommes si près de se perdre ?
Un programme est conçu, et de gré ou de force l’homme est “dans le Vent”  de ce Souffle Divin : Le Verbe, qui le met face à ses états de  conscience et à ses responsabilités planétaires et futures.