Tantôt, elles étaient le fait d'une politique locale systématique et délibérée. Ainsi, de 1536 à 1540, en Angleterre, des envoyés du roi Henry VIII s'employèrent à dissoudre les monastères, dont ils s'appropriaient les richesses et les terres, après en avoir chassé moines ou nonnes. Ils s'en prirent aussi aux grands sanctuaires, tels ceux de saint Thomas à Canterbury et de saint Hugues à Lincoln. Les objectifs du mandat royal donné aux envoyés de Lincoln étaient explicites: il s'agissait « d'amener nos chers sujets à la juste connaissance de la vérité, en leur ôtant toute occasion d'idolâtrie ou de superstition» et, aspect non moins important, « de veiller à ce que lesdits joyaux, reliques et pièces d'orfèvrerie soient acheminés en sûreté jusqu'en notre Tour de Londres ».
Les protestants s'efforçaient de provoquer un changement d'optique irréversible, en déracinant l'idée traditionnelle selon laquelle le pouvoir spirituel animait l'ensemble du monde naturel et était particulièrement présent dans les lieux sacrés et certains objets matériels à forte charge spirituelle. Ils voulaient épurer la religion, une purification qui impliquait de « désenchanter » le monde. Le royaume de la nature devait être débarrassé de la moindre parcelle de magie, de sainteté ou de spiritualité ; et le royaume de l'esprit, se confiner aux limites du genre humain. On déniait même aux éléments des sacrements chrétiens tout pouvoir spirituel. Les réformés expliquaient en effet que croire à la présence effective du Christ dans le pain et le vin consacrés de la messe équivalait à croire que les saints étaient réellement présents dans leurs représentations pieuses ou encore à être persuadé du pouvoir des saintes eaux, des reliques sacrées ou de la terre sainte. Tout cela n'était que superstition et idolâtrie.
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C'est ainsi que la Réforme préparait le terrain pour la révolution scientifique mécaniste qui aurait lieu au cours du siècle suivant. La nature avait déjà perdu tout enchantement; le monde matériel avait été séparé du domaine de l'esprit — une théologie à laquelle s'adapterait sans difficulté l'idée que l'univers était simplement une vaste machine, tout comme la relégation du royaume de l'âme dans une petite région du cerveau humain seulement. Il devenait possible de faire la démarcation entre les domaines scientifique et religieux: la science accaparant l'ensemble de la nature, y compris le corps humain; tandis que la religion s'occuperait des aspects moraux et spirituels de l'âme humaine.
1) Note d'André Bouguénec : "ce qui est vrai. L'Esprit est lié à la Matière que tant qu'on sait les distinguer l'un de l'autre. C'est pourquoi sans une Science de ceux-ci, on est assuré du dévoiement in tel lectuel. Esprit : A lire dans la Terre.
2) Note d'André Bouguénec : Idem. Une Science de la Matière niant la possibilité d'une science de l'Esprit est sans issue. Elle ne s'élèvera pas réellement en Amour. AMES