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« Le "Jugement Dernier", ne peut, ne pourra se faire, QUE sur les paroles dites en tous les temps par les hommes et les responsables des diffusions qui ont conditionné le monde, au TEST du Testament du Christ qui l'a ré-digé au commencement pour qu'en Fin il s'ouvrit et con-Fonde toute la Dispersion, cette "Diaspora" "tra-issante" ou trahissante à travers l'Ordre Divin de Rassemblement. Qui, quelle religion, quelle académie, quelle initiation, s'est voulue assez large de coeur et d'esprit pour rassembler toutes les brebis égarées de la Maison d'Israël, c'est-à-dire, non pas le pays des juifs, mais la Maison de Dieu qu'est le Verbe par TOUT : IS-RA-EL : "l'Intelligence-Royale-de Dieu", contre laquelle l'homme doit "lutter", "l'emporter" (de la racine hébraïque sârôh), ce qu'est en vérité l'antique Iswara-El, cette "Agartha" invisible, enfouie dans les profondeurs de la "Terre", c'est-à-dire de l'Homme, dans ses ténèbres. »

André Bouguénec, Entretien avec l'homme, article Qui est Judas ?

 

 

 

Effets de la déconstruction de Mai 68 - Jean-Michel Castaing

Mai 68, ou les mauvaises surprises de la déconstruction

Incontestablement, Mai 68 a libéré la subjectivité des Français. Personne ne veut plus que le Bien ou le Vrai lui soit imposé de l’extérieur sans qu’il ne se l’approprie. L’individu s’est rendu maître de la place et s’est érigé en maître des élégances en matière de vérité comme en celle des « pratiques bonnes ». En ce domaine, le terrain était préparé de longue date.

Subjectivité versus objectivité

La remise en question du « discours du Maître » par Foucault est antérieure aux « événements ». Mai 68 ne fera qu’accélérer le processus de délégitimation de l’enseignement dans sa prétention à dispenser un savoir péremptoire. L’intelligence ne pouvait que gagner à ce que la matière de l’enseignement « fasse sens » pour ceux auxquels il était dispensé.

Ce changement de paradigme ne tarda pas à se répercuter sur le plan des relations interpersonnelles. Peu à peu le vouvoiement céda la place à un tutoiement à visée égalitariste, un peu comme sous la Révolution française, lorsque l’apostrophe directe entre « citoyens » se substitua aux codes de politesse de l’Ancien Régime. Plus globalement, Mai 68 aura entériné la défiance envers les institutions, soupçonnées d’être des lieux de pouvoirs coercitifs, ou bien de reproduction des élites, selon la terminologie de Bourdieu.

Rupture de la transmission

La libération de la subjectivité de l’individu n’a pas eu que des effets négatifs. Mais que lui a-t-il manqué pour tenir ses promesses d’affranchissement de la jeunesse ? Tout simplement le souci de transmettre le savoir objectif qui était la matière des cours magistraux d’avant la rupture. Le résultat de cette omission ne s’est pas fait attendre : la subjectivité, privée d’objets substantiels sur lesquels exercer son travail d’assimilation, s’est rabattue sur l’exercice de ses propres désirs spontanés. Ce qui a entraîné l’émergence, du côté de l’offre, d’une sous-culture de laquelle furent exclues les exigences de jadis.

Les baby-boomeurs n’ont pas pâti de cette situation : ils possédaient les codes et le bagage culturel de la société d’avant. En revanche, leurs enfants se sont retrouvés dépossédés d’un formidable héritage. Ces derniers ont dû s’orienter dans l’existence munis de boussoles peu fiables : une morale facile, de la musique, des concerts et des engagements politiques manipulés par des vieux briscards qui essayaient de masquer leurs échecs en matière de justice sociale par des surenchères sociétales suspectes.

Dans l’enseignement, le pédagogisme, qui fait tourner le savoir autour de l’enfant, et non l’inverse, est le rejeton putatif de ce renversement de perspective. Devant les graves carences de nos enfants en matière de connaissances, les responsables politiques de tous bords sont en train de revenir de cette erreur stratégique majeure.

Triomphe du relativisme

De leur côté, les classes moyennes et défavorisées ont-elles gagné au change avec le triomphe du subjectivisme ? L’honnêteté oblige de répondre par la négative. Pour que ce mouvement de « libération » pût tenir ses promesses, il eût fallu honorer la vérité comme elle le mérite. Il n’en fut rien. Sous la pression des « maîtres du soupçon », de Nietzsche particulièrement, la « vérité » fut tenue pour une superstructure complice du pouvoir. La « vérité » n’était plus qu’une entité métaphysique au statut problématique, une émanation de la subjectivité précisément, donc une instance toute « relative ». Était vrai ce qui avantageait tel individu, ou bien telle classe, telle collectivité, à un moment précis de l’histoire.

C’est ainsi que Mai 68 a parachevé le vaste mouvement de contestation de la vérité. De là vient la remise en question du rôle de l’enseignement, et des savoirs en général. Dans l’esprit des gourous soixante-huitards, l’« émancipation » ne pouvait s’opérer qu’au dépens de la transcendance de la vérité par rapport à la subjectivité.

Naissance du tout-à-l’ego

Le paradoxe est que cette mise à l’encan du savoir aura pour conséquence l’appauvrissement de la subjectivité, qui, au lieu d’avoir à se confronter aux géants de l’esprit humain, allait au contraire tourner autour du petit ego de son suppôt, comme certains électrons sont prisonniers de leur gravitation autour du noyau. Ce qui était au départ une promesse de liberté a mué en asservissement à l’air du temps (et aux prescripteurs du marché).

Qu’on se réfère, si on en doute, aux études menées sur les désirs de nos ados. D’ailleurs, sans cette subjectivité qui n’arrive pas à sortir de son orbe égocentré, le règne de la marchandise aurait-il pris autant d’emprise sur les esprits ?

La foi impactée à son tour

Et la foi, là-dedans ? A-t-elle été impactée elle aussi par le « joli mois de mai » ? Mais comment aurait-elle pu y échapper ? Le renversement de l’objectivité par la subjectivité s’est traduit, dans le domaine religieux, par l’inflation des « témoignages » au détriment de l’enseignement des dogmes. L’affectif a pris le pas sur le rationnel. Combien de jeunes croyants sont encore en mesure d’articuler un semblant de discours sur la Trinité, l’Incarnation, le Salut, les fins dernières ? Il serait intéressant de faire un sondage sur le sujet.

C’est bien beau de vouloir privilégier l’existentiel au détriment du « dogmatique », réputé un peu vite « étroit » et « raide », mais attention à ce que l’affectif ne vire pas au final à l’obscurité, puis à l’obscurantisme de substitution, quelque nom qu’il se donne ! L’explosion du phénomène sectaire atteste du danger de découpler le Bien du Vrai. Pour ne rester que dans la sphère chrétienne. Un phénomène similaire s’observe en milieu musulman. Mais là, c’est le phénomène djihadiste qui prétend suppléer, à sa façon, l’ignorance des traditions. Comme quoi l’ignorance n’est jamais neutre, et finit toujours par être circonvenue par l’obscurantisme.

Notre époque est en train de redécouvrir que les maîtres et les traditions, sur lesquels Mai 68 a porté le soupçon, sont irremplaçables. Même si on désire les dépasser, encore faut-il les bien connaître au préalable pour cela. À ce niveau, le projet de déconstruction, que la geste révolutionnaire de 68 a ratifié dans son principe, s’est avéré désastreux, dans ses diverses versions « exotériques », pour les nouvelles générations.